Le Cabinet d’Arts Graphiques de Genève s’est mis pour objectif de révéler
un aspect « méconnu » de l’œuvre de notre bon vieux Ferdinand
national lors de son exposition d’hiver. Vu qu’il est presque impossible de
faire deux pas dans un musée CH sans tomber sur l’une de ses œuvres, faut
avouer que l’appât est un peu risqué. Néanmoins, avec un fond de plus de 750
esquisses et études ainsi que 241 carnets de croquis, le Cabinet d’Art
Graphiques a de quoi jouer la carte de l’inédit.
Étude pour un autoportrait, 1891 Mine de plomb, plume et lavis d’encres grise et brune, 114 x 145 mm, Cabinet d’arts graphiques du Musée d’art et d’histoire, © MAH, Genève, photo : André Longchamp |
Dessins, études, lithographies et carnets occupent les quatre salles de
l’expo, divisée thématiquement. Un accrochage selon le processus d’élaboration
permet de suivre facilement l’évolution de certains projets ; ainsi dans
la première salle se succèdent sept dessins et études d’une figure féminine, de
la simple ligne contour au remplissage couleur en passant par le travail du
clair-obscur. La jeune femme se retrouvera tout à droite dans la version finale
de Regard dans l’infini de 1916 (Kunstmuseum Winterthur). Dans la deuxième salle, les études
préparatoires pour l’Autoportrait de 1916 (MAH) témoignent de l’inouï talent d’Hödlerli pour la ligne – en
particulier le dessin sur papier calque.
Les carnets présentés dans les vitrines sont ouverts à des pages
pertinentes, en corrélation avec les feuilles accrochées aux murs. Un écran
tactile dans la dernière salle permet également de feuilleter et de zoomer sur
certains carnets. La visite est par conséquent très interactive et le
visiteur-détective est encouragé à chercher les différentes étapes de la
création d’une œuvre. Un grand merci aux commissaires d’expo d’avoir eu la
présence d’esprit de mettre à disposition des images couleur des versions
finales ainsi qu’une liste des œuvres concernées accrochées au MAH (Musée d’Art
et d’Histoire), à 100 m. de là. Bien que ça puisse paraître évident, un
nombre ahurissant d’expositions sont incapables de fournir un tel service. La
simplicité et la clarté des explications données au sujet de différentes
techniques de copie et de report, telles que la vitre de Dürer ou le poncif, sont également à saluer.
Aucun panneau de présentation par salle ; leur titre ainsi que les
labels individuels des œuvres – relativement longs – donnent toutes les
informations nécessaires. Faciles à lire, utiles et intéressants, les textes
font cependant parfois un peu grincer des dents avec quelques envolées
interprétatives. Dans l’Autoportrait dit ‘de Néris’, il semblerait que du « visage au regard
pénétrant » d’Hodler « émane une interrogation muette sur le sens et
la durée de l’existence ». Hum. Pas très évident à identifier, ce genre
d’interrogation. Si vous ne discernez pas la « part d’éternité qu’Hodler
donne à voir au soir de sa vie » dans un paysage du lac Léman, ne vous
inquiétez pas non plus, c’est toujours un peu difficile à reconnaître, les
parts d’éternité.
En résumé, une expo très agréable et bien conçue qui vaut la peine d’être
vue. Le visiteur pourra non seulement découvrir le processus de création d’un
des plus importants peintres suisses (je n’ose pas marquer LE mais mon cœur y
est), mais également se régaler d’esquisses, de dessins et de lithographies de
qualité. Mes préférés : la lithographie de la figure de gauche du Printemps
(1901), l’étude de l’Automne (1893), l’étude pour l’Autoportrait du
Parisien (1891, version
finale au MAH), l’étude pour le portrait de Vibert James l’invincible
carougeois (vers 1907) et
encore la lithographie de sa seconde épouse, Berthe (1909). Et les
vôtres ?
Etude pour Le Printemps, sans date, lithographie au crayon, image 675x 435 mm, Cabinet d'arts graphiques du Musée d'art et d'histoire, © MAH, Genève, photo: André Longchamp |
Etude pour L'Automne, 1893, 635 x 395 mm, mine de plomb, aquarelle, rehauts de gouache et d'huile, certaines parties vernies, sur papier beige, collé en plein et monté sur carton, © MAH, Genève |
P.S. A ne pas manquer: l’étonnant canard à lunettes et haut de forme dans un
des carnets de croquis.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire