Blackstock n’efface pas, n’utilise pas de gomme, mais colle et rajoute du
papier vierge pour continuer son travail ou pour le corriger. Les lignes de
raccord de feuilles sont visibles et se marient à une typographie joliment
vintage, créant l’aspect d’un artisanat d’un autre temps.
Gregory Blackstock, The Ravens, 2009, Mine de plomb, marqueur, pastel gras, et crayon couleur, 135 x 46 cm, Photo: Olivier Laffely, © Collection de l’Art Brut, Lausanne. |
Le souci d’un rendu méthodique et rationnel s’associe à un côté farfelu,
brouillant les frontières entre science et poésie. Blackstock possède
l’application d’un scientifique – recherchant les caractéristiques précises
d’un sujet d’étude, désirant présenter des listes exhaustives et véridiques –
combiné à la fantaisie d’un artiste ; en somme, une sorte de savant un peu
fou, comme sorti d’un siècle passé. Les thématiques sont aussi sérieuses – tels
les bombardiers de la Seconde Guerre Mondiale – que saugrenues, comme par
exemple les motifs de décoration d’œufs ou les objets qui font du bruit. Les
légendes ne sont pas non plus toujours orthodoxes : l’artiste y glisse
parfois des éléments autobiographiques ou des remarques personnelles, comme
dans la planche des plantes douloureuses.
La composition, régulière et symétrique, est très plaisante à l’oeil.
Quelque chose de rassurant se dégage de ces listes : on parvient, en un
regard, à englober une partie infime mais totale du monde. Notre environnement
apparaît classifié et agencé sans pour autant être ennuyeux. Parmi l’ordre se
cache l’extravagance : ainsi le soulier à cran d’arrêt d’un film de James
Bond se trouve dissimulé dans la planche figurant les chaussures.
Gregory Blackstock, The World Landmark Buildings, 2011 , Mine de plomb, marqueur, pastel gras, et crayon couleur, 112 x 60,6 cm, Photo : Arnaud Conne, © Collection de l’Art Brut, Lausanne. |
L’exposition, qui prend place dans la petite salle rectangulaire du premier
étage de la Collection de l’Art Brut, est accompagnée d’un documentaire
permettant de découvrir Blackstock dans son atelier/appartement, arborant
fièrement un pull et une casquette ‘Seattle Artist’. Si l’on se réjouit de voir
sa première exposition en Europe, on regrette cependant qu’elle soit aussi
courte. Un ouvrage monographique consultable dans la salle d’expo et en vente à
la librairie remédie dans une certaine mesure à cette frustration. Les non-anglophones se réjouiront de voir que de petits
dossiers contenant les traductions françaises des planches sont également disponibles.
Si vous êtes du genre à faire des listes à profusion et que vous aimez l’imagerie old school, Gregory L. Blackstock ne manquera pas de vous inspirer.
Si vous êtes du genre à faire des listes à profusion et que vous aimez l’imagerie old school, Gregory L. Blackstock ne manquera pas de vous inspirer.
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